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Sujet
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S’il y a bien une chose indissociable de l’Amiga, ce sont les nombreuses cracktros qui précédaient les jeux achetés sous le manteau ou récupérés dans la cour du lycée. Gandalf fut l’un de ces coders émérites qui participa à cette grande aventure sous la bannière d’Outlaws, groupe incontournable de la demo scene.
Pirates pour certains, artistes et génies de la programmation pour d’autres, ces groupes nous offraient de la pure création artistique en quelques kilo-octets… Et on peut affirmer qu’ils font partie intégrante de l’histoire de la machine de Commodore.
C’est au sein de ce maelstrom bouillonnant d’idées que vogua Eric alias Gandalf dans les années 90, retour sur les arcanes des swappers, des BBS, des trainers…
Pourrais-tu te présenter auprès de nos lecteurs tout en conservant évidement les détails trop personnels qui pourraient permettre à toutes les victimes de tes crack intros de retrouver ta trace.
Eric aka Gandalf / Outlaws, 51 ans, mais j’ai aussi eu d’autres Handles dans divers groupes comme « Gordon Pacha » ou « GuanaBatz ».
Quels furent tes débuts dans la micro-informatique et comment as-tu commencé à taper des lignes de codes sur un Amiga ?
J’ai commencé en 1983 avec un Zx81 que mon père avait acheté, je recopiais des listings de magazine comme Hebdogiciel, certains avaient des erreurs dans leurs publications et j’essayais de les résoudre, mais avec 1k de mémoire et aucune sauvegarde, on était assez vite frustré.
Rapidement, vers 1984 je suis passé sur Commodore 64, encore une initiative de mon père.
Là, les choses sont devenues plus sérieuses : Dans ma Ville, j’ai rencontré via des annonces de journaux des membres de groupes pirates comme WOW, CFR ou encore BEST COMPANY, et je leur achetais du Warez. Je me suis vite rendu compte qu’en achetant à l’un, je pouvais également échanger avec l’autre, et vice et versa.
Les premières « crack intro » apparaissaient devant chaque jeu, ça me passionnait et je me suis pris au jeu : je voulais reproduire ce qu’ils faisaient !
J’ai écrit aux adresses que l’on mentionnait dans les scrolltexts, leur demandant des infos sur comment programmer, et voilà c’était parti…
J’ai commencé à bidouiller des petits trucs en Assembleur 6502 et à Swapper du Stuff, comme on disait. Ensuite, vers 1987, avec l’arrivée des A500, je suis passé sur Amiga… et là, directement, c’est devenu encore plus sérieux : une presse informatique grand public s’est mise en place, et trouver de l’info sur la programmation était plus facile.
Puis, l’idée de faire un groupe a germée avec un copain d’école, « Tomcat », et de fil en aiguille, j’ai rencontré « Dekmin », de mémoire, il devait avoir 13 ans quand il m’a contacté, sa maitrise du code nous avait impressionné sur c64, puis ensuite « Wizard », « Félix », etc. … et voilà, en gros, la base des futurs membres des Outlaws était en place. Mais avant d’en arriver là, on a rejoint différents groupes, ce qui consistait pour moi, la plupart du temps, à créer la section belge d’un groupe pirate international.Donc Outlaws n’était pas ton premier groupe ?
Non du tout, j’ai créé la section belge d’Alpha Flight, ensuite, j’ai suivi Alpha flight dans son association à Genesis, puis création de LSD Belgium et Pussy Belgium.
J’ai aussi créé des groupes comme Axis Inc. (à ne pas confondre avec Axis) – TDM (The Dream Master) avec Charly & Hornet, mais aussi déjà une bonne partie de la base des Futures « Outlaws ».Ensuite, il y a eu ma rencontre avec Toxic (un super gars, on a eu pas mal de fous rires), il était dans AFL à une époque, on s’est appelé, et dans la discussion revenait souvent le fait que c’était pénible d’être une section d’un groupe, ça tenait quelques mois, puis il splittait et tout était à refaire.
On a décidé de créer le nôtre : « Outlaws ».
Pour l’anecdote, on cherchait un nom de groupe qui sonnait bien et qui ne laissait aucun doute sur le fait que les règles, on s’en foutait royalement ! Je lisais une BD, les Tuniques Bleues, l’album s’appelait Outlaws… je l’ai proposé à Toxic, ça lui a plu et c’est parti comme ça.
On a décidé de créer 3 Sections : Amiga, PC et Consoles, avec un leader par section.
J’ai contacté « Félix » qui était sur Amiga et PC et il est devenu le leader PC. S’est ensuite ajouté « Wonder ».
Toxic a recruté des membres et des BBS MultiNodes (il avait déjà le sien : « Toxicity »), idem de mon côté, et j’ai créé avec « Dekmin » la Borntro des Outlaws, notre première production que l’on a présenté à la TRSI party de Louvain.Au sein d’Outlaws on te trouve sous plusieurs casquettes : Coder, Texter, Trainer Maker, Organizer, Modem Trader, Leader, Cracker, Co-Sysop !!!! Ma parole tu ne dormais jamais ?!
Effectivement, je ne dormais pas beaucoup, souvent que 4 à 5 h par nuit, j’ai foiré mes premières études à cause du rythme de la scène. Outlaws ayant été créé sur base de 3 sections, ça me laissait un peu plus de temps pour programmer, mais que ce soit Toxic, Félix ou moi, on jouait un peu les hommes-orchestres, on devait passer du rôle de Coder à celui Co-sysop, Spreader, etc…
Si je me souviens bien, on a été jusqu’à 102 membres, ce qui ne représente pas mal de travail.Etais-tu dans le trip de trouver des protections des jeux et de réussir à les contourner ?
Non pas du tout, je ne suis pas très bon à ce jeu
Alors oui, il y a une sorte de challenge à réussir à contourner la protection, mais je me concentrais principalement sur la programmation d’intros, petites démos, Boot-loader, Menu-loader …
Cracker n’était vraiment pas mon trip, j’essayais quelques trucs en désassemblant, mais je n’étais pas obstiné. La concurrence était rude, surtout sur les versions anglaises d’un jeu ou d’un logiciel : un programme sortait le matin et parfois 1h après, un groupe l’avait déjà cracké (Classic , Quartex , Skid Row , Fairlight etc…)
Déjà, il fallait savoir quel était le type de protection, et si celles se basant sur un mot de passe se référant au manuel d’utilisateur étaient facile à déjouer (un coup d’action replay, on traçait le code jusqu’à la sous-routine qui vérifiait, on remplaçait par un « NOP » et c’était joué… d’autres fois, c’était un peu plus « tricky » : Les quelques-unes que j’ai fait sauter était des versions FR que j’avais envie d’avoir et qu’on me demandait d’essayer de cracker… Mais je préférais nettement le coté créatif d’une intro / demo, c’était plutôt une tâche rébarbative pour moi, le cracking , un rôle que j’étais un peu contraint et forcé de tenir.Tu as dû être un accro des BBS avec des factures téléphoniques astronomiques ? quels souvenirs en gardes-tu ?
J’ai effectivement eu quelques très belles factures, heureusement, je travaillais et je pouvais régler la facture à mes parents, mais on avait nos petites astuces
Et oui carrément accro ! J’ai commencé bien avant l’arrivée des BBS avec de simples colis postaux, c’était long, mais sympa car on ajoutait un petit mot ! J’ai eu des échanges de courriers pendant très longtemps avec quelques Sceners très connus, on échangeait des idées, des astuces, c’était sympa ☺Avais-tu des contacts réguliers avec les autres groupes de la demo scene Amiga?
Oui, via les BBS !
Je me souviens d’un BBS à New York où j’allais pas mal, « The Edge ». Il était dans le groupe Silents, il y avait pas mal de monde connu et j’échangeais pas mal de message via ce board, mais aussi Flying Saucer, Pirates Haven, Spellbound, The Pit , Terminal Disaster … C’est incroyable le nombre de BBS qui ont éclos à cette période : U.S robotics a dû se faire une montagne d’argent en vendant ses modems ☺Et les coding party ?
Pas tellement, j’ai dû en faire entre 5 et 8, dont la Easter Party de TRSI à Louvain, un très bon souvenir. C’est toujours sympa de rencontrer des gens avec lesquels on échange des messages sur les boards ou via le courrier. On a aussi créé notre propre Coding Party, la « Low Density Party », avec un autre groupe belge, « Therapy ».
Comment s’est achevée l’aventure outlaws, Le groupe a-t’il splitté ? tout le monde est-il passé au PC par lassitude de l’Amiga ?
L’aventure Outlaws s’est achevée pour moi peu après la naissance de ma fille, je n’avais plus assez de temps à consacrer à l’Amiga et la société Amiga avait fait faillite… j’espérais beaucoup d’un repreneur.
Au même moment, j’ai repris des études, j’avais une vie de famille et c’est devenu ma priorité, mais j’ai eu du mal à décrocher : je suivais de loin, j’ai continué à programmer pour le fun sur mon Pc des petites intros. Idem sur la Game Boy color mais je n’ai même pas le souvenir de les avoir publiés, c’était Juste pour le Fun…
J’ai régulièrement un peu de nostalgie, dans le sens positif du terme, d’une super époque où tout était à faire.
Mais le groupe a perduré après mon départ, Toxic et Félix était toujours là… et il n’y a pas si longtemps, max 10 ans, j’ai encore vu passer des productions PC, des Cracks PC, des Générateurs de Sérials signés « Outlaws » … Sans doute d’anciens membres qui ont repris la scène, aucune idée, ou des membres arrivés après mon départ…Quels sont les meilleurs souvenirs que tu conserves de cette période Amiga ainsi que les plus mauvais ?
Mes souvenirs : les réunions du groupe, de temps en temps, on se réunissait dans un cercle sportif de squash et billards, en général c’était pour discuter de ce que l’on allait faire dans le groupe, mais ça finissait toujours en buvant un coup ou en jouant un billard et au final très peu de décisions étaient prises … mais c’était aussi ça, la Scène Amiga, simplement des gars se réunissant pour se marrer, boire un coup et parler Code, Graphiques & Musique.
Le plus mauvais : les tensions, rivalités entre groupes pirates, c’était parfois pénible…Tu continues à coder ? As-tu des projets en cours ?
Plus trop, je suis informaticien (Un peu comme tous les anciens Sceners) et même dans mon métier, je ne programme plus trop ….
Que représente pour toi l’Amiga ?
Un pionnier de l’informatique, ma machine de cœur, mes meilleurs souvenirs d’informatique, idem pour le C64, mais aussi la naissance d’une technologie.
Je pense que l’Amiga, est l’ordinateur qui ne veut pas mourir, et qu’il ne mourra qu’avec notre génération de passionnés. Un gros regret fut la faillite de la société, cette machine avait tout le potentiel pour s’imposer, mais bon …Propos recueillis par Alex Menchi
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